L'appel de la Streif
C'est le rendez-vous incontournable de la saison pour les skieurs. De vendredi à dimanche, entre un Super-G, une descente et un slalom, ils vont s'en donner à coeur-joie sur la mythique Streif de Kitzbuehel. Même Julien Lizeroux, qui a ouvert en Autriche son palmarès en slalom l'année dernière, n'y a pas résisté puisque le Français s'alignera samedi au départ de la descente en vue du combiné.
Julien Lizeroux commence à prendre ses marques en descente. (Reuters)
Hermann Maier était peut-être celui qui en parlait le mieux. Vainqueur de cinq Super-G et d'une descente dans la station autrichienne, le jeune retraité du circuit était l'un des rares à avoir fait de Kitzbuehel son jardin de jeu préféré là où beaucoup s'y sont éternellement cassé les dents. Rendez-vous incontournable et incomparable du circuit, l'étape autrichienne, qui est au ski ce que Wimbledon est au tennis ou encore Monaco à la Formule 1, continue de faire fantasmer les foules et les descendeurs en premier lieu, eux qui rêvent de s'inscrire dans la lignée des Killy, Sailer, Schranz, Collombin, Klammer, Read, Zurbriggen, Heinzer, Aamodt, Strobl, Eberharter, Walchhofer, Rahlves, Cuche ou encore Didier Defago, vainqueur ici-même l'année dernière.
Mais ne dompte pas la Streif qui veut, cette terrifiante pente du Hahnenkamm qui vous plonge, sur les premiers mètres à 51% d'inclinaison, en trois secondes de 0 à 80 km/h ! Depuis la zone de départ, située à 1665 mètres au-dessus du niveau de la mer, jusqu'à l'arrivée située 860 mètres plus bas, les skieurs atteignent ainsi des vitesses de 150 km/h avant que le calvaire ne se termine, au terme des 3312 mètres d'un parcours accidenté, après un peu moins de 2 minutes de souffrance.
Lizeroux s'y essaye à son tour
Tous ceux qui s'y sont un jour attaqués en garde un souvenir mémorable, teinté d'excitation et d'appréhension. "
Je me souviens de ma première ici. J'étais tellement effrayé que je n'avais qu'une idée en tête : être à l'arrivée", se rappelle ainsi Didier Cuche, monté depuis le début de sa carrière à sept reprises sur le podium, dont deux fois sur la plus haute marche à dix ans d'intervalle. Alors quand le moment approche de se présenter dans le portillon de départ, à chacun sa méthode. "
J'essaye de parler avec les gens de tout et de rien, de n'importe quoi qui puisse me faire oublier ce que je suis sur le point de faire", avance pour sa part le descendeur américain Steve Nyman. Le départ donné, se présentent rapidement la Souricière, le premier saut vers l'inconnu, le Steilhang puis la Bruckenschuss, l'Alte Schneise, Seidlalm et Lärchenschuss, qui mènent au saut avant la Hausbergkante, et enfin le chemin de la "Traverse", derniers mètres avant le saut final où l'Italien Kristian Ghedina s'était miraculeusement récupéré il y a quelques années.
Autant de secteurs devenus mythiques, où certains y perdent leur équilibre et leurs illusions et où d'autres y gagnent les dixièmes de seconde décisifs. Sans qu'aucun ne soit moins impressionnat qu'un autre... "
Je pense que le secteur le plus important si situe entre le départ et l'arrivée !", résume ainsi l'Autrichein Mario Scheiber. Qu'on se le dise, il faut être fou pour s'attaquer à la bête qui, malgré tout, vous attire... Vainqueur ici-même du slalom l'an dernier, une victoire qui a ouvert son palmarès en Coupe du monde, Julien Lizeroux y a succombé malgré la proximité des Jeux Olympiques. "
Depuis gamin j'en avais envie et, depuis l'an dernier, j'avais prévu de le faire", expliquait-il mercredi, à l'issue de la première descente d'entraînement. Relégué à plus de cinq secondes de Cuche pour sa première, puis à moins de cinq secondes de Bode Miller jeudi, le Plagnard sera, en vue du combiné, le seul classique de l'hiver qui additionne le temps de la descente et les deux manches de slalom, au départ de la descente samedi. Avec une boule dans le ventre. Mais avec la terrible envie d'entrer dans la caste des skieurs qui ont survécu à la Streif.