Le mode d'emploi du dopage selon Lance Armstrong
Cyclisme
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Cocktail huile d'olive-testostérone et cintres pour transfusions sanguines: de multiples témoignages ont permis à l'Agence américaine antidopage (Usada) d'éclairer le système de dopage mis en place autour de Lance Armstrong.
Mis à jour il y a 31 minutes
L'Américain Lance Armstrong a gagné sept fois le Tour de France.
Image: AFP
Cocktail huile d'olive-testostérone, cintres pour transfusions sanguines, «motard» dédié aux produits dopants: de multiples témoignages ont permis à l'Agence américaine antidopage (Usada) d'éclairer le système de dopage mis en place autour de
Lance Armstrong.
EPO, testostérone, cortisone, auto-transfusions: tout au long de son rapport de 202 pages publié mercredi, l'Usada multiplie les détails accablants pour le septuple vainqueur du Tour de France.
Ainsi, lors du Tour 1999, sous la direction de Johan Bruyneel, son nouveau directeur sportif, l'US Postal avait un employé dédié au transport de l'EPO, alias «le motard», affirme l'Usada.
«Ses qualités de motard allaient être testées car il devait aussi jouer le rôle de trafiquant de drogue, explique l'Usada. Son rôle était de suivre le Tour sur sa moto et de livrer l'EPO à Pepe» (Pepe Marti), offic
iellement «entraîneur», mais connu par les coureurs comme «le courrier».
Baby-sitter
L'EPO était directement livrée dans des seringues et il suffisait aux coureurs «de se piquer, puis de jeter les seringues dans une canette de coca-cola, et c'est le docteur Del Moral (le médecin de l'équipe) qui devait ensuite les sortir du car le plus vite possible», explique Tyler Hamilton, un ancien coéquipier de Lance Armstrong.
Durant ce Tour 1999 et les années suivantes, Armstrong et ses coéquipiers font des cures de testostérone mélangée à de l'huile d'olive. Un mélange baptisé «l'huile» et qu'Armstrong avait qualifié d'«or liquide» devant Betsy, l'épouse de son coéquipier Frankie Andreu, à Nice, en 1999.
Ce n'est qu'à partir de 2001 que l'équipe commence à utiliser la testostérone sous forme de patch, selon Hamilton. Pour les auto-transfusions sanguines, Lance Armstrong était là encore au coeur du système selon l'Usada, avec comme «cache» son appartement de Gerone, en Espagne.
C'est là qu'en 2003 Floyd Landis, vainqueur éphémère du Tour de France 2006 avant d'être déchu pour dopage, vient se faire prélever du sang pour une future auto-transfusion. Le docteur Michele Ferrari assiste à l'opération, et il range la poche de sang du coureur dans un frigo caché au fond d'un grand placard, dans la chambre de Lance Armstrong.
Quelques jours plus tard, Landis est chargé par Armstrong de garder son appartement quelques jours, en son absence, afin de surveiller le sang stocké. «Landis accepta de baby-sitter le sang», explique l'Usada.
Toujours en 2003, juste avant le Tour de France, Lance Armstrong utilise l'appartement de George Hincapie, l'un de ses coéquipiers, également à Gérone, pour se faire une auto-transfusion. «Armstrong n'avait pu le faire chez lui car il avait des amis de passage», explique Hincapie.
Enfermé dans une chambre avec le docteur Del Moral, il recourt à un drôle d'accessoire: «Quand on se réinjectait notre sang, on avait l'habitude d'attacher la poche de sang à un cintre et ensuite de l'accrocher au mur», raconte Hincapie.
Evacuation par les toilettes
Auto-transfusion toujours, cette fois pendant le Tour 2004, le soir même d'une étape. Armstrong et plusieurs de ses partenaires y passent, dans le bus de l'équipe, avant le retour à l'hôtel. L'opération a lieu au bord d'une route de montagne, dans un lacet, après que le bus de l'équipe a simulé une panne, selon un autre témoignage de Landis.
Grande force également de l'équipe de Lance Armstrong, selon l'Usada: utiliser les produits les moins détectables. En recourant à la testostérone en patch par exemple, ou des injections d'EPO en intra-veineuse plutôt que sous-cutanées.
Pour abaisser rapidement l'hématocrite trop élevé après une auto-transfusion, on s'injecte une solution saline. En 20 minutes, le tour est joué. C'est ce que fait Armstrong lors des Mondiaux 1998, pour «contourner» le contrôle surprise de l'UCI.
Parfois, la seule solution est de détruire purement et simplement les produits interdits. Comme lors de ce Tour 1998. C'est l'année de l'affaire Festina, où la crainte gagne le peloton. Ainsi, raconte Emma O'Reilly, une employée de l'équipe, des produits représentant des dizaines de milliers de dollars sont évacués par les toilettes du bus...