MOTOCYCLISME
Diapasons désaccordés
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Le ton monte entre Jorge Lorenzo (à g.) et Valentino Rossi (à dr.). Les quatre derniers grands prix s’annoncent chauds entre les deux pilotes Yamaha
Le corps à corps entre Valentino Rossi et Jorge Lorenzo, dimanche au Japon, n’a pas plu du tout à l’Espagnol. Qui entend régler ses comptes dès que possible
Jean-Claude Schertenleib - le 04 octobre 2010, 21h33
Le Matin
GP du Japon
Yamaha. C’est d’abord un emblème, trois diapasons entrecroisés, clin d’œil musical à l’honorable Torakusu Yamaha, un homme plutôt habile de ses mains qui, dans les années 80 du XIXe siècle, eut une illumination le jour où il fut appelé pour réparer l’orgue mécanique d’une église d’Hamamatsu. Un empire allait naître. Parallèlement à la production d’instruments de musique, Yamaha deviendra bientôt une grande marque de l’industrie motocycliste japonaise en plein développement. Une marque qui s’intéresse, immédiatement, à la compétition, à la fois banc d’essai idéal et vitrine promotionnelle efficace.
Lorenzo, un os pour Rossi
Les titres arriveront, d’abord dans les petites et moyennes cylindrées. Des personnages suivront: Giacomo Agostini, Jarno Saarinen, Kenny Roberts et bientôt ses fils spirituels, Eddie Lawson et Wayne Rainey. On est au début des années 90, du siècle passé cette fois, et la marque aux trois diapasons, privée des services de Rainey – un terrible accident a cloué le Californien sur une chaise roulante – peine à retrouver la place qu’elle entend tenir. Jusqu’au transfert du siècle, l’engagement de Valentino Rossi. Yamaha gagne de nouveau dans la catégorie reine; des courses, des titres, une réputation, celle de proposer la moto la plus équilibrée du monde.
Cette saison, Yamaha remportera de nouveau le championnat. Grâce à un jeune Espagnol, Jorge Lorenzo, qui s’est non seulement fait une place avec son talent et sa volonté, mais surtout en refusant de cultiver le moindre complexe d’infériorité vis-à-vis de son envahissant équipier, Valentino Rossi. La suite, on la connaît: Rossi gagne le premier GP de la saison, mais il se fait mal à une épaule deux jours après ce triomphe initial; c’est Lorenzo qui prend la main, qui accumule les sans-faute, qui est même libéré de la menace Rossi lorsque celui-ci tombe violemment lors des essais du GP d’Italie. On croit à la passation des pouvoirs. A un détail, d’importance, près: «Certains ont juste oublié que je n’avais pas disparu pour toujours.» C’est Rossi qui le dit. Et qui l’a montré dimanche, en ne se gênant pas de toucher plusieurs fois Lorenzo en pleine course, troisième place en jeu.
Déclaration de guerre
C’en est trop pour celui qui sera normalement couronné dimanche prochain, en Malaisie. Alors que Rossi boit du petit-lait, Lorenzo ne parvient pas à ravaler sa rancœur: «Vous avez apprécié le spectacle? Parfait. Mais le problème, c’est que tout le monde oublie que nous pilotons des motos très rapides et que lorsqu’on vous touche volontairement, on met tout simplement votre vie en péril.» Lorenzo poursuit: «Chaque fois qu’il (Rossi) m’a dépassé, il n’a pas été correct, il en profitait pour me toucher. Il doit aimer cela, puisqu’il avait déjà agi ainsi avec Gibernau et Stoner. Mais il y a une différence: moi, je ne vais pas me laisser faire. Et dès que j’aurai mathématiquement assuré mon titre mondial, je me battrai avec les mêmes armes que lui, s’il le faut.»
Petit rappel: il reste quatre GP au programme. Et les chances de voir les dirigeants de Yamaha réussir à raccorder deux de leurs trois diapasons semblent minimes.