Tiger Woods aux abois
Par Philippe Coste, publié le 25/12/2009 à 10:01 - mis à jour le 25/12/2009 à 12:08
Accident conjugal et commercial: Tiger Woods, l'icône du golf, le sportif le mieux payé de la planète chute de son piédestal. Et l'Amérique est ébranlée. Retour sur un mois de péripéties.
REUTERS/Aaron Josefczyk
Le 12 décembre, Tiger Woods, l'enfant prodige du golf, a annoncé son retrait "pour une durée indéterminée".
Les dieux aussi ont le blues. Même Michael Jordan, le grand frère, n'arrive plus à le joindre sur son portable. Charles Barkley- sommité du basket et autre locataire de l'Olympe- en est réduit à s'adresser à Tiger via CNN: "Quand ce genre d'incendies se déclare dans ta vie, il faut que tu parles à une autre célébrité qui est passée par là", lui conseille ce noceur invétéré de la jet-set sportive. Peine perdue. Depuis son communiqué du 12 décembre annonçant
son retrait du circuit professionnel "pour une durée indéterminée", Tiger Woods a changé de numéro de téléphone. Tout porte à croire que le sportif le plus connu et le mieux payé de la planète a rejoint en catastrophe le monde des humains. Le briseur de records, 14 victoires en grand chelem à 33 ans, vient d'en battre un autre, moins enviable: celui de
la plus rapide déchéance de l'histoire des mythologies américaines. Et cette saga de la déglingue, conclue en quinze jours de clameur des tabloïds et de déception nationale, en dit autant sur l'Amérique que celle de son effarant succès.
Qui veut mesurer l'ampleur du culte voué à l'enfant prodige du golf devrait se souvenir des
premières réactions candides du public, le 27 novembre, après l'annonce de son étrange accident de voiture, sur la voie privée de sa propriété de Windermere, en Floride: le jour suivant, rassuré sur la santé de l'idole, l'Américain moyen se demandait d'abord ce que pouvait bien faire l'ange infaillible "dehors à 2 heures du matin". Son communiqué laconique, dans les heures suivantes, nourrissait de plus graves spéculations. Woods y rappelait qu'il avait droit à une vie privée, et qu'il n'était pas "parfait". Le saint avouait-il- scandale!- avoir bu un verre de trop? Pire. Pour la première fois, les médias respectables se faisaient bientôt l'écho de la possible liaison du champion avec une New-Yorkaise, Rachel Uchitel. Le lien entre la belle et cet accident, dû à une violente dispute entre le golfeur et sa somptueuse et furieuse épouse, le top-modèle suédois Elin Nordegren, apparaissait de plus en plus probable.
Mais le croirait-on? L'Amérique, réputée pudibonde, a d'abord passé l'éponge, transformant cette passade en histoire d'amour... Avant de découvrir la suite, une avalanche tout droit descendue du mont Bimbo: 13 nanas, aux dernières nouvelles, pour la plupart sorties des salons VIP des boîtes les plus courues de Las Vegas, Los Angeles ou New York, à l'exception d'une diva du porno entrevue avant son mariage.
Les sponsors battent en retraite
Soit. Et alors? Hormis un affront sordide à sa femme, laquelle annonce son divorce et se laisse photographier sans alliance, Tiger Woods n'a commis aucun crime que n'ait déjà perpétré la fine fleur volage du tennis, du football ou... du golf. Signe d'indulgence de l'opinion, sa cote d'amour, qui oscillait depuis une décennie entre 85 et 91% d'approbation, s'est réduite seulement de moitié en trois semaines, à un score qui ferait encore le bonheur de plus d'un chef d'Etat. Mais les sponsors battent en retraite.
Si adulé soit encore l'incroyable sportif, son retour dans l'engeance des simples mortels constitue le pire accident industriel de la décennie pour les enseignes qui empruntent son image et paient l'essentiel du milliard de dollars encaissé par la star depuis le début de sa carrière professionnelle, en 1996, à l'âge de 21 ans. La transgression et la morale comptent moins dans ce revirement commercial que le fossé béant entre le "vrai" Tiger Woods et sa toute-puissante image marketing.
Aux yeux de TAG Heuer, de General Motors, de Gillette ou d'Accenture, le champion longiligne, qui, à l'âge de 17 ans, préparait son entrée dans les pros tout en bûchant dans la prestigieuse université Stanford, incarnait une perfection humaine digne d'un salaire de 100 millions de dollars annuels. La compétitivité forcenée, la droiture et l'élégance indicible. Les valeurs sacrées du travail et une concentration inégalée.
Comment les blâmer? Le vrai Tiger Woods a lui-même contribué au mythe: à 10 mois, l'enfant qui regardait son père répéter ses swings au fond du garage familial, avait réussi à décocher une balle dans le filet d'entraînement. A 2 ans, en 1977, le surdoué taquinait le green en direct à la télévision au côté de l'humoriste et golfeur émérite Bob Hope. Il en avait 3 lorsque son père, Earl Woods, un colonel noir membre des commandos d'élites, revenu de deux mobilisations au Vietnam, tentait de le faire admettre au golf de la Marine, à Cypress, près de leur domicile de Californie. En 1987, Tiger, âgé de 11 ans, remportait les championnats du monde junior et plus de 30 tournois dans la même année.
Bio express
30 décembre 1975 Naissance à Cypress (Californie).
1976 Premier swing, à 10 mois.
1996 Premier tournoi en septembre, première victoire en octobre. Rejoint le circuit professionnel américain.
1997 Elu joueur de l'année.
2004 Epouse le mannequin suédois Elin Nordegren.
18 juin 2007 Naissance de sa fille.
8 février 2009 Naissance de son fils.
27 novembre 2009 Victime d'un accident de voiture dans sa propriété.
12 décembre 2009 Annonce son retrait de la compétition.
La légende de perfection se nourrit de prouesses réelles : le gamin, tout jeune, avait appris à faire le vide autour de lui, afin de déjouer les manoeuvres de son père, qui agitait des clefs ou jetait son sac au sol pour le déconcentrer pendant ses swings. Mais il n'ignorait rien des travers humains. Adolescent, Tiger avait, après une défaite, cassé un à un tous ses clubs de golf. A 21 ans, tout juste passé pro, il livre une bordée de blagues cochonnes devant un journaliste du magazine GQ, qui s'empresse de publier le scoop, pour démystifier l'idole. Le jeune homme se referme comme une huître, réduisant depuis lors ses rares interviews à des réponses lénifiantes visées par l'armée d'attachés de presse de ses sponsors. Ce bunker commercial lui convient, tant il préserve son intimité. Son premier achat somptuaire, avant sa seconde et luxueuse propriété à 39 millions de dollars de Miami, est un yacht de 500 mètres carrés et 15 chambres où il s'initie à sa passion pour la plongée sous-marine: "Car les poissons, eux, ne demandent pas d'autographes", dira-t-il.
Mais le monde ne se lasse pas de Tiger Woods. En 1997, au soir de sa victoire aux tournois des Masters, Earl, son père, avait juré que le fiston était "l'élu, capable, comme Mandela ou Gandhi, de toucher des nations: pas des gens, des nations". Tiger n'a pas relevé le défi, refusant même, lui, l'enfant "post-racial" d'un Noir métissé de Cherokee et de Blanc et d'une Thaïlandaise un peu chinoise, de se mêler de symbolique et de politique. On le fait aujourd'hui pour lui. Depuis le 27 novembre, Rush Limbaugh, le brûlot des radios de droite, s'amuse à déboulonner cet "Obama du golf" de son piédestal consensuel en rappelant le penchant apparent de Tiger pour les femmes blanches. Glenn Beck, un autre gueulard des ondes, l'a comparé à O.J. Simpson. On l'a fait taire. Mais une divinité est morte.
Les chiens aboient la caravane passe...........
Ceci dit je ne le pense pas, J'aime bien ce sportif............et son truc ma fi....Pas le premier ni le dernier