MOTOCYCLISME
Quand la moto de Rossi lui A dit: «Je t'aime»
Image © Keystone
«Le Matin» a pu se procurer la note manuscrite que le roi des GP a fait parvenir à son futur ex-employeur Yamaha. Il y est question d'amour, même si Valentino Rossi voit désormais son avenir en rouge avec la marque italienne Ducati.
le 16 août 2010, 21h56
Le Matin
«Il m'est très difficile d'expliquer en quelques mots la nature de mes rapports avec Yamaha lors de ces sept années. Que de choses ont changé depuis ce lointain an 2004; essentiellement, c'est «elle» qui a changé, ma M1.
A l'époque, elle n'était qu'une pauvre machine de MotoGP de milieu de grille, dénigrée par une bonne partie des pilotes et des gens du paddock. Aujourd'hui, après l'avoir aidée à grandir, après avoir contribué à l'améliorer, je peux la voir sourire dans son stand, courtisée et admirée, traitée simplement comme la première de la classe.
La liste des gens qui ont rendu cette transformation possible est longue; mais j'aimerais avant tout remercier Masao Furusawa, Nakajima et «mon» Atsumi, au nom de tous les ingénieurs japonais qui ont travaillé dur pour changer la face de «notre» M1.
Merci aussi à Jeremy Burgess et à tous les gars de mon équipe, qui se sont occupés d'elle avec amour sur les pistes du monde entier. Merci encore à tous les garçons et toutes les filles qui ont travaillé pour le team Yamaha durant ces années.
Mais voilà, le moment est venu de me lancer dans un nouveau défi. Mon travail ici est terminé. Malheureusement, même les plus belles histoires d'amour se terminent, même si elles vous laissent de nombreux souvenirs, des moments inoubliables. Ainsi, lorsque, après ma première victoire avec ma M1, je me suis arrêté dans l'herbe sur le bord du circuit de Welkom et que je lui ai donné mon premier baiser, elle m'a alors regardé dans les yeux et m'a dit: «Je t'aime.»
Valentino Rossi
Interview de Gabriele Del Torchio, président de Ducati Motor Holding
«Nous avons simultanément fait le premier pas»
Monsieur le Président, entre Ducati et Rossi, qui a fait le premier pas?
Nous l'avons fait simultanément. C'est un peu comme une alliance entre deux grandes stars, non?
Le flirt dure depuis quand?
Oh, c'est une vieille histoire, qui a commencé il y a plusieurs mois. Mais nous nous sommes dit oui en juillet et le contrat a été signé il y a quelques jours.
Monsieur Del Torchio, le sportif le plus populaire d'Italie qui rejoint une marque mythique comme la vôtre, la pression sera terrible, non?
Je ne vois pas les choses comme cela. Je prends plutôt cette nouvelle aventure comme un formidable défi pour tous; le mariage entre le talent de nos ingénieurs et les enseignements que peut nous amener Valentino est prometteur.
Valentino Rossi coûte cher, très cher (on parle de 13 millions d'euros de salaire annuel), comment allez-vous financer cela?
Ducati est désormais aux mains d'un solide groupe d'investisseurs. Nous engagerons l'argent nécessaire pour gagner.
Donc, il n'y a pas eu d'hésitation lors de vos négociations?
Le sujet de discussion, entre les deux parties, n'a jamais concerné le salaire de Valentino, mais bien la faisabilité technique de l'accord.
Avant qu'il ne signe pour Yamaha (fin 2003), Rossi avait déjà été en contact avec Ducati, mais il avait refusé. Pourquoi accepte-t-il aujourd'hui?
C'est à lui qu'il faut poser la question.
D'accord, mais il y a bien eu un élément déclencheur?
Oui, et c'est sa relation avec Filipo Preziosi, notre chef ingénieur. Dans tout le processus de discussion, la clé du problème, c'était cela.
En engageant Valentino Rossi, Ducati prend un sacré risque; si vous gagnez, ce sera grâce à lui; si vous perdez, ce sera parce que la moto n'est pas assez bonne?
Mais non, comme dans tout mariage, nous partageons nos destinées. Si on gagne, on gagnera ensemble et si on perd, on perdra ensemble. Mais je ne crois pas à cette ultime possibilité!
L'accord court sur deux saisons. Apprendre en 2011 et gagner en 2012?
Vous savez, il est impossible de faire des prévisions précises pour un titre mondial. Bien sûr, je croise les doigts pour que Valentino gagne immédiatement. Imaginez, le triomphe de deux icônes, ce serait extraordinaire.
Mais Rossi est aussi une icône fantasque, qui aime faire ce qu'il veut, comme monter dans une F1 au milieu de la saison?
Sachez que d'après son contrat il ne sera pas autorisé à faire des tests avec Ferrari, si c'est ce que vous imaginez.
Même si Ferrari et le groupe Fiat vous le demandent avec insistance?
Ducati est basé à Borgo Panigale, dans la banlieue de Bologne. Nos voisins directs ont pour noms Ferrari, Lamborghini et Maserati; alors, bien sûr, nous partageons les mêmes passions.